IA : la DSI doit reprendre la main

Dans 15 % à 20 % des cas, les directions métiers mènent des projets d’IA en se passant du service IT. Une situation qui ne va pas sans risques pour les entreprises, et face auxquelles les DSI doivent réagir !

Le monde de l’intelligence artificielle est vaste. Sous cette bannière se cachent une multitude de technologies qui vont aider un système à sentir, penser, apprendre et agir par lui-même : des infrastructures de stockage, des « fabrics » réseau, des serveurs, des applications, des accélérateurs… Autrement dit, des ressources gérées par l’IT. Dans les faits, la situation est un peu différente. Alors que l’adoption de l’IA n’en est qu’à ses débuts dans les entreprises, beaucoup avancent à tâtons et mènent des initiatives non coordonnées qui passent parfois complètement sous le radar de la DSI. Selon une étude menée par Forrester, les directions métiers veulent aller vite sur l’implémentation des nouvelles technologies d’intelligence artificielle. Et pour cela, elles contournent complètement la DSI dans 15 % à 20 % des cas.

Pas d’IT, pas de problème ?

Attirés par l’immense potentiel de l’IA pour améliorer l’expérience client ou augmenter les ventes, les décideurs métiers initient les déploiements de solutions qui requièrent une bonne connaissance du contexte business. L’exemple typique est celui des chatbots, ces logiciels capables de dialoguer avec un consommateur pour lui apporter des informations sur un service ou un produit. Ces agents virtuels sont bâtis sur des processus de compréhension du langage naturelle qui exploitent des algorithmes d’intelligence artificielle. D’ici 2020, 80 % des entreprises en utiliseront [1]. En passant par un fournisseur tiers, les directeurs marketing, financier ou encore RH, espèrent faire fi des challenges rencontrés en interne. Selon Forrester, environ deux tiers des entreprises sont confrontées à de nombreuses difficultés pour mettre en œuvre leur stratégie d’adoption de l’IA. Au premier rang d’entre elles, les inquiétudes concernant d’éventuelles failles de sécurité et la conformité de ces nouvelles technologies, grandes consommatrices de données, avec les réglementations sur la protection des informations. Aucun DSI ne prendra le risque d’alimenter une IA avec des flux massifs de données sans s’assurer au préalable de sa fiabilité.

Des compétences indispensables

Si les procédures de test et de validation inhérentes à tout projet IT peuvent sembler longues et contraignantes pour les métiers, elles permettent en réalité d’accélérer la transformation du business. « Quand l’équipe IT est aux commandes, l’organisation déploie non seulement deux fois plus de briques IA que lorsque le métier pilote, mais elle exploite aussi des technologies plus avancées », souligne Forrester. Les organisations qui impliquent la DSI dans leurs projets ont trois fois plus de chances d’utiliser le machine learning et son deux fois plus susceptibles d’adopter le deep learning. L’explication est simple, les métiers n’ont pas les compétences pour déployer et maintenir des solutions aussi complexes et l’IT dispose d’une vue globale sur le système d’information qui lui permet de dépasser les silos métiers susceptibles de freiner les projets. Et ceux qui sont malgré tout persuadés du contraire se rendront tôt ou tard à l’évidence. Plus des trois quarts des sociétés estiment qu’exclure l’équipe IT des projets IA conduira inévitablement à lui demander de l’aide plus tard. Pire, les efforts à fournir pour apporter le support nécessaire une fois le projet lancé seront bien plus importants que si l’IT avait été impliquée dès le départ pour poser les bonnes fondations.

Une infrastructure à moderniser

La DSI a sans contestation possible la meilleure position pour prendre le lead sur la stratégie IA de l’entreprise. Elle ne doit néanmoins pas perdre de vue que cela implique également des changements pour elle. En premier lieu, elle devra consentir aux investissements nécessaires pour moderniser son datacenter. Le manque d’automatisation dans la gestion de l’infrastructure est notamment une des principales difficultés qui freinent la mise à disposition des ressources pour les projets d’intelligence artificielle. Les processus de machine learning et deep learning requièrent par ailleurs des performances de très haut niveau, aussi bien en matière de calcul, que de stockage et de réseau. 80 % des personnes interrogées par Forrester souligne à ce titre le besoin d’accélérateurs de type GPU, FPGA ou autres processeurs optimisés pour les réseaux neuronaux, en mesure de réduire les temps d’apprentissage de plusieurs jours ou semaines à quelques minutes ou heures.

Et si des budgets parfois conséquents devront être alloués à cette transformation IT, que les DSI se rassurent, le retour sur investissement le sera lui aussi. Grâce à l’amélioration de la relation client, à la création de nouvelles sources de revenus, à la réduction des risques ou encore à une plus grande efficacité opérationnelle, plus de la moitié des organisations s’attendent à un ROI entre x2 et x5. À condition que la DSI reprenne la main.

[1] https://business.lesechos.fr/directions-numeriques/digital/marketing-digital/0302204543086-productivite-du-chatbot-a-l-intelligence-artificielle-323056.php

About the Author: Jérôme Osinéri

Jérôme Osinéri, 46 ans, a commencé sa carrière chez IBM en Tunisie en tant que responsable marketing, en charge des études de marché. De retour en France il a rejoint Brother en 1997 comme Chef de Produit imprimantes et multifonctions, en charge du marketing mix. Il continue son parcours dans l’informatique en intégrant l’équipe marketing Dell en 1999, avec la responsabilité de la ligne de produit portables pour la France, et comme focus principal l’accompagnement de la force de vente grands comptes. En 2005 il bascule dans les solutions pour l’entreprise, avec la fonction de Business Manager Stockage pour Dell sur la région EMEA. Dans un premier temps en charge de la ligne de produit PowerVault, il gère en 2008 le lancement des solutions EqualLogic nouvellement acquises par Dell. En 2009, son scope s’étend à toutes les lignes de produits stockage, avec comme priorités les lancements produit et la relation avec les partenaires technologiques. En septembre 2010 il rejoint le segment « Public et Grandes Entreprises » de Dell avec la responsabilité des programmes marketing stockage pour la région EMEA. A ce titre, il développe notamment du contenu pour former et assister les forces de vente dans leurs conversations avec les clients sur les problématiques de gestion des données, il est également en charge des évènements stockage et des activités de promotion et communication des offres vers la clientèle, pour tous les pays de la zone EMEA. Depuis septembre 2017 il est de retour dans l’équipe Dell EMC France en charge du marketing de toutes les solutions d’infrastructure, serveurs, stockage, solutions convergées et hyper convergées, solutions de protection des données, réseaux. Jérôme Osinéri est père de deux enfants et titulaire du diplôme de l’école de commerce Kedge Business School à Marseille, ainsi que d’un Master Spécialisé en Marketing et Communication acquis à ESCP Europe Business School.