IA générative : concepteurs ou utilisateurs, l’enjeu commun de la formation

Que l’on soit développeur ou prompteur, l’utilisation de l’intelligence artificielle générative doit se faire de manière responsable. Une fois le cadre éthique posé et les acteurs sensibilisés, la technologie pourra tenir toutes ses promesses !

— Par Dr. Tawhid Chtioui, Président-fondateur d’aivancity, la Grande École de l’IA et de la Data

ChatGPT et d’autres IA génératives grand public marquent une étape importante dans le domaine de l’intelligence artificielle. Bien qu’elles ne représentent pas une révolution technologique en soi, elles incarnent la concrétisation d’une technologie qui, jusqu’à présent, n’était familière pour la plupart des gens que par le biais de films de science-fiction.

L’accessibilité grandissante des IA génératives pour le grand public présente de nombreux avantages. Tout d’abord, elle contribue à améliorer l’acceptabilité et l’utilisation de l’IA dans divers domaines professionnels. Ensuite, elle suscite un intérêt accru pour les métiers de l’IA et incite les entreprises à repenser leurs pratiques organisationnelles.

Toutefois, cette démocratisation de l’IA n’est pas sans poser de nouveaux défis éthiques et sociétaux. Parmi les enjeux les plus pressants figurent la protection de la vie privée, la propriété intellectuelle et la responsabilité. En effet, l’utilisation croissante d’IA génératives dans la création de contenus soulève des questions quant à la paternité des œuvres et à la protection des données personnelles utilisées pour alimenter ces intelligences artificielles. De plus, la responsabilité des actions menées par des IA, notamment en cas de conséquences néfastes, doit être clairement définie.

Former l’utilisateur, mais aussi le concepteur

Face à ces enjeux, il est essentiel que les acteurs du domaine de l’IA, les décideurs politiques et la société civile travaillent ensemble pour établir des cadres éthiques et réglementaires adaptés. Ces cadres devront garantir un équilibre entre les potentialités offertes par les IA génératives et la protection des droits fondamentaux des individus, tout en veillant à encourager l’innovation et le développement responsable de ces technologies.

Il est essentiel de ne pas limiter les programmes de formation aux seuls aspects technologiques et au code et d’accorder toute l’importance à la compréhension des usages professionnels et des enjeux éthiques ; c’est cette hybridation entre technologie, business et éthique qui garantira l’émergence des meilleures pratiques pour le développement et l’utilisation de l’IA, et donc un avenir prometteur pour ces technologies.

L’impact des IA génératives dans les entreprises dépendra évidemment de la façon dont elles seront utilisées et déployées. On peut s’attendre à ce qu’elles aient un impact significatif sur les manières de travailler. En automatisant certaines tâches chronophages comme la rédaction de rapports ou mails standardisés, nous libérons du temps pour des tâches plus critiques et créatives.

Le danger n’est pas la technologie (ou l’innovation de façon plus générale) quelle qu’elle soit mais la façon avec laquelle on s’en sert. Rien de nouveau. Mais on ne peut pas s’arrêter à cela. L’enjeu de l’IA (comme toute autre invention) ne se limite pas à celui qui s’en sert mais concerne aussi et surtout celui qui la conçoit.

La technologie est neutre. En revanche, l’éthique de l’utilisateur et celle du concepteur ne le sont pas. C’est pour cette raison que l’éthique de l’IA est un axe essentiel dans la formation. Les futurs concepteurs de l’IA doivent être sensibilisés aux conséquences de leurs actes et incités à s’interroger sur l’impact de leurs créations sur notre futur.

Préparer les jeunes générations à des métiers encore inexistants

Dans un paysage éducatif où l’innovation technologique émerge à un rythme effréné, des institutions académiques ont choisi d’adopter une approche radicale en interdisant l’utilisation de ChatGPT, imposant même des sanctions à ceux qui osent s’en servir à des fins académiques. Cette réaction, bien que compréhensible dans un contexte de préservation des normes académiques, semble toutefois contre-productive et déconnectée de la réalité évolutive de la technologie et de son impact sur notre société.

Pour mieux appréhender cette situation, un regard rétrospectif sur l’histoire des avancées technologiques s’avère instructif. Lorsque la photographie a émergé, nombre de voix s’élevaient pour prophétiser la fin de la peinture en tant qu’art majeur. Or, le temps a démontré que ces craintes étaient infondées, les deux formes d’expression artistique coexistant harmonieusement et se nourrissant mutuellement.

De la même manière, plutôt que de réprimer l’utilisation de l’IA, il est impératif de repenser notre paradigme éducatif. Désormais, notre mission consiste à préparer les jeunes générations à des métiers encore inexistants, à maîtriser des technologies encore à venir et à résoudre des défis dont nous ne pouvons encore mesurer toute l’ampleur.

Cette réorientation exige une adaptation de nos approches pédagogiques, afin d’encourager les apprenants à innover et à naviguer dans un monde en perpétuelle mutation. Il est crucial de cultiver de nouvelles formes d’intelligence, telles que la pensée analytique et créative, la gestion de la complexité, l’intelligence émotionnelle et collective, ainsi qu’une éthique solide et des capacités d’action concrète.

Prenons cette évolution comme une opportunité pour concevoir des expériences d’apprentissage personnalisées et interactives, stimulant ainsi la génération d’idées novatrices et accélérant la recherche et l’innovation. Dans ce nouvel écosystème éducatif, le rôle de l’enseignant évoluera de celui de simple transmetteur de connaissances à celui d’architecte de compétences, permettant aux élèves de s’épanouir pleinement dans un monde où l’adaptabilité et la créativité sont des atouts essentiels.

About the Author: Tawhid Chtioui

Dr. Tawhid CHTIOUI est Président-fondateur d’aivancity, la Grande École de l’IA et de la Data.